17 décembre 2024
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22 novembre 2016
Poursuivons notre analyse des méthodes principales de ventes complexes et leur adéquation au monde digital avec la méthode de l’excellent Jim Holden, CEO du cabinet de conseil en ventes Holden International (qu’il a créé en 1979), et auteur du livre The Selling Fox (2002). Pour lui, vendre à un client signifie aussi être meilleur que les concurrents, et ne pas vendre se traduit au contraire par la mort de l’entreprise. Une règle simple, être meilleur que les autres pour survivre. Et il faut croire que pour Holden, le roi de la jungle, c’est le renard, surnom qu’il donne aux éléments les plus talentueux et les plus impliqués dans les entreprises. C’est que la vente est un métier difficile. Voici 30 ans que j’entends les professionnels se plaindre qu’il manque régulièrement de commerciaux en France, malgré un taux de chômage qui tutoie désormais les 10%. Et la situation ne s’améliore pas véritablement.
J’ai eu pour ma part la chance d’être formé par des Selling Foxes, alors que j’apprenais le métier chez Philips (dans sa division B2B) dans les années 80. Voyons donc la méthode et posons-nous la question souvent entendue : l’ère digitale, notamment l’inbound marketing et le social selling signifient-ils la mort des méthodes de vente, et est-il encore nécessaire de « closer un deal** » ?
J’ai eu la chance d’être entouré de Selling Foxes au début de ma carrière. Je croyais qu’il fallait être gentil avec les clients et « les servir », et je fus étonné de voir au contraire les bons commerciaux être capables d’éduquer leurs clients. Je voyais même certains d’entre eux réclamer auprès de mon patron ce besoin d’éducation et de fermeté. La dureté de la relation – sans rien entamer de sa courtoisie – était un élément crucial du bon déroulement de la transaction. Parmi ces Selling Foxes il y avait mon ami Michel qui n’hésitait pas à arrêter ce qu’il faisait pour m’épauler et me donner des astuces qui permettaient de « closer » les deals. Et dans ce cas, le « closing » se faisait tous les mois, car le chiffre d’affaires était mesuré en continu. Quelle école, quelle leçon de vente, et tous les jours dans ma carrière d’entrepreneur, je pense à Michel, mon Selling Fox, qui m’a tout appris et sans qui je ne serais pas capable de vous écrire aujourd’hui.
Malgré cela, Holden souligne que le Selling Fox n’est pas toujours reconnu pour ce qu’il est ni pour la valeur qu’il apporte réellement à son entreprise. Mon expérience fut tout autre chez Philips (Michel est devenu directeur commercial de l’entreprise avant de la quitter 25 ans plus tard).
Un Selling Fox doit être proactif sur ces étapes pour réaliser un bon « closing ». En sachant cela, le commercial peut le réaliser de trois façons différentes :
Le Selling Fox utilise également le « trial close » lorsqu’il manque une des trois conditions de « closing » (être prêt, avoir la validation et les moyens).
Anticiper les objections : sans y passer des jours, le vendeur doit se demander quelles objections du client pourraient compromettre la vente.
Identifier, sonder, et résoudre les objections : dans toute négociation le client oppose des objections, mais la façon d’y répondre varie selon les vendeurs. Le Selling Fox identifiera le problème sans se laisser déborder par les émotions, puis interrogera le client pour connaître précisément ce qui se cache sous ce problème et les conséquences de ce problème. Puis il se chargera de résoudre au plus vite le problème en question, ce qui est aisé dans le cas où il a bien su anticiper les objections.
Clore tôt : le but est de se positionner tôt et ne pas laisser de moment de flottement dans le processus de vente. Le vendeur qui « laisse le client respirer » laisse en réalité le client choisir un autre fournisseur.
Clore sans hésiter : dans une relation commerciale, un vendeur a tout intérêt à être direct. Le client sait à qui il a affaire, et un vendeur qui ne va pas droit au but lui montre inconsciemment qu’il manque de confiance. Comme nous l’avons vu dans l’article sur le SPIN Selling, plus la vente est complexe et plus le vendeur est associé à la solution vendue. Ainsi un vendeur qui est confiant et professionnel sera associé aux yeux du client à une solution fiable et qualitative.
Sécuriser la décision : dans les ventes complexes où plusieurs personnes interviennent côté acheteur, il est nécessaire pour le vendeur de prévenir les acteurs qui interviennent autour du décisionnaire. En effet, un accord formulé par un client n’est jamais officiel tant que seuls le vendeur et l’acheteur sont au courant. Le but est donc de transmettre la nouvelle aux collaborateurs de l’acheteur avec lesquels le vendeur est en contact. Un décisionnaire qui voudrait changer d’avis risquerait de perdre la face car la décision aurait déjà été actée par tous.
Piéger les autres renards : selon Jim Holden, il est courant que dans le cadre d’une vente complexe des vendeurs concurrents viennent auprès du client avec une contre-proposition, sitôt la nouvelle de la transaction apprise. Dans ce cas, le Selling Fox préviendra son nouveau client des risques de pratiques peu éthiques de la concurrence (bien entendu interdites au sein de son entreprise) qui pourraient entacher la réputation et la crédibilité du client.
En 2002, l’utilisation du digital par les fonctions commerciales et même marketing en était encore à ses balbutiements. Les médias sociaux n’existaient pas encore au moment où Jim Holden écrivait son livre, et le digital se limitait largement au Sales Force Automation. Et encore, celui-ci était loin de ressembler aux outils modernes d’aujourd’hui, connectés aux médias sociaux et à une foultitude de sources d’information liées aux événements de l’entreprise (les « signaux d’affaires »).
Près de 15 ans plus tard, j’entends souvent dire que le digital a changé la donne, ce qui est éminemment vrai. Nos articles sur ce blog font suffisamment cas de ce bouleversement. Grâce aux outils de la sales intelligence, le commercial d’aujourd’hui est complètement transfiguré. Alors que le rôle du marketing et du commercial se rapprochent (le marketer est fortement attendu sur ses capacités à apporter du lead et de la notoriété spontanée au travers du digital et le commercial est de plus en plus sollicité pour faire de la curation, voire du marketing de contenu) il serait aisé de conclure que le commercial n’a plus besoin de « closer » ses deals. En quelque sorte, le vendeur, presque un gros mot dans certaines bouches, serait devenu une sorte de guichetier ou de commercial assis qui n’aurait plus véritablement besoin de mettre la pression sur ses clients. Il lui suffirait de cliquer sur Internet au bureau et hop ! le client achèterait. Rien n’est plus faux.
Certes, le marketing va permettre d’apporter plus de clients notamment au travers de son site Web et de générer un trafic et un nurturing important qui va alléger de façon considérable le travail du commercial. Mais si l’outil de sales intelligence va permettre d’améliorer la connaissance du commercial, il ne doit en aucune manière oublier de « closer ». Le marketing étant à portée de tous les fournisseurs B2B, du moins en apparence, c’est même le contraire qui va se passer.
Les Selling Foxes qui auront la capacité de mélanger le monde moderne et ancien seront les gagnants de demain. Non pas ceux qui croient benoîtement que la vente est devenue facile grâce à Internet, mais ceux qui sauront fournir le meilleur du contenu, qui auront le meilleur outil de sales intelligence et en même temps, qui sauront clore les ventes de façon la plus naturelle et la plus efficace possible. Les gagnants seront aussi ceux qui sauront élever, féliciter et encourager leurs Selling Foxes à former des petits renardeaux.
* * nos lecteurs me pardonneront cet immonde barbarisme, qui est hélas celui utilisé dans le métier. Le traduire reviendrait à ne pas être compris de la profession.
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